• ☼ François Yvinec 04/11/2021

    François Yvinec, ancien président du Brest Armorique, est mort le 04 novembre 2021

    François Yvinec président du Brest Armorique – Ligue 1 – de 1981 à 1991 est mort dans la nuit de mercredi à jeudi (04 novembre 2021) à Calpe (Espagne) où il s'était retiré depuis 2001, à l'âge de 89 ans.

    François Yvinec DC 04 nov. 2021 (Brest-Football-768x466)

    Quelques semaines après la mort de Bernard Tapie, c’est un autre président mythique du football français des années 1980 qui s’éteint. Si Yvinec n’a pas placé son club aussi haut que le bouillant dirigeant de Marseille, s’il n’a pas eu l’honneur des ors de la République, ses années à la tête du club finistérien auront laissé un souvenir de démesure, de faste… et de cataclysme final qui n’est sans rappeler l’OM de la même époque.

    Bien avant que le Qatar ne prenne en main des clubs pour s’acheter une image internationale, c’était l’époque des hommes d’affaires locaux, truculents et mégalos, qui avaient le mérite de mettre au pot leur propre argent, quitte à y perdre quelques plumes. Louis Nicollin à Montpellier, Claude Bez à Bordeaux et donc Yvinec à Brest. C’était alors le tableau d’une France pittoresque des terroirs, prête à s’écharper pour un penalty refusé. Des personnages qui n’étaient pas totalement sans rappeler Sivardière, joué par Jean Bouise dans Coup de tête (1979), président un brin paternaliste et cynique du club fictif de Trincamp.

    François Yvinec fut même en quelque sorte le précurseur de ces condottieres ambitieux et gouailleurs. Fils de boulanger du pays léonard, il est à la tête d’une entreprise de pâtisseries industrielles. Dans le même temps, le Stade brestois était au bord du gouffre financier. Yvinec s’engage, comble le trou et fait remonter le club en première division. Ce fut le départ d’une décennie un peu folle, durant laquelle les Finistériens ne firent jamais mieux qu’une huitième place au classement final, malgré les noms passés : par exemple, Bernard Lama, Patrick Colleter, Paul Le Guen, Vincent Guérin et David Ginola, qui constituèrent tous les cinq l’ossature du PSG quelques années plus tard. De quoi inspirer une mélancolique litanie au chanteur du coin, Christophe Miossec.

    Au milieu des années 1980, le projet brestois reçoit l’appui de Michel-Édouard Leclerc et enregistre les venues de stars sud-américaines : l’Argentin José Luis Brown, champion du monde quelques semaines plus tôt, et le Brésilien Julio César, passé ensuite par la Juventus et le Borussia Dortmund. En plus de la promesse de salaires confortables, le club s’assurait la signature de ces joueurs par un passage chez le concessionnaire du coin. Pour l’Argentin, ça sera une 205. Pour le Brésilien, un peu plus gourmand, ça sera une Mercedes.

    Mais le transfert le plus rocambolesque fut celui de Roberto Cabañas, attaquant paraguayen qui évoluait alors en Colombie. En novembre 1987, le président breton se rend lui-même sur place, dans le pays à l’époque le plus dangereux du monde. C’est le début d’un périple de six semaines. Dans le pays de l’Eldorado où plus d’un aventurier s’était hasardé à la recherche de pépites d’or, Yvinec se retrouve à négocier avec les frères Rodriguez, fondateurs du cartel de Cali et patrons informels de l’America, club de la ville et du joueur. Yvinec obtient la signature de celui-ci, avance 350 000 dollars mais les Colombiens tardent à le lâcher. Plus ou moins conscient du pedigree de ses interlocuteurs, Yvinec n’est pas totalement impressionné par les pistolets accrochés à leurs ceintures et est bien décidé à ramener son joueur en Bretagne.

    François Yvinec et Roberto Cabañas à l'arrivée du joueur à Brest

    Pour une histoire de mauvaise signature dans le contrat, les narcotrafiquants portent plainte contre le Breton, qui se retrouve assigné à résidence par une justice locale de mèche, le passeport confisqué. Sous écoute, Yvinec échange avec les siens au téléphone en breton. Même Jacques Chirac, maire de Paris, s’en mêle et menace de suspendre les cyclistes colombiens du prochain Tour de France… Finalement, Yvinec se fait la malle clandestinement, imperméable bleu et lunettes de soleil sur le nez à l’aéroport de Bogota, quelques jours avant Noël ; il retrouve Cabañas à Caracas avant d’atteindre Brest.

    L’aventure, comme pour Tapie, comme pour Bez, se termina mal...

    Suite dans Causeur 15/11/2021 [archive]

    Lire aussi Actualité du Stade Brestois 15/11/2021 [archive]

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    Internautes

    Ah le Brest des années 1980, avec Bernard Pardo et Joël Henry qui passaient leurs nuits au Melody. Faut pas oublier que Corentin Martins est aussi passé par Brest avant d'éclater à l'AJ Auxerre. Y avait des clubs qui ont fait de sacrées bonnes affaires lors de la débâcle de 1990/91. C'était encore l'époque où les clubs n'avaient droit qu'à trois étrangers. Depuis l'arrêt Bosman [12/1995] le foot est mort. Même si [François Yvinec] semble remarquable, cela montre bien que le foot et tout son fric est devenu un monde à vomir. (3 internautes)

    Merci pour ce portrait haut en couleur d'un personnage de notre France régionale (je me rappelais très bien l'anecdote de Cabañas, qui était un grand joueur au demeurant) mais qui n'existe plus aujourd'hui ! La bourgeoisie provinciale a disparu (elle vit aujourd'hui au ralenti sur ses acquis) au profit des bobos mondialisés ! Et ils sont moins marrants et surtout beaucoup plus wokisés ! ... (B.G)

    Un grand président de cette trempe qui a joué un rôle essentiel dans le foot français : Roger Rocher [1920-1997] président de l'AS Saint-Étienne de 1961 à 1982. Lui aussi en a vu de toutes les couleurs et lui aussi a joué avec les limites de la légalité ! Sans ce président nous n'aurions jamais connu le renouveau du football français... [Roger Rocher] a mené sa petite affaire avec courage, dévouement et désintéressement. Grâces lui en soient rendues... Mais comme pour Yvinec, il est mort dans l'anonymat médiatique et dans la réprobation morale de nos futurs puritains ! Paix à son âme... (2 internautes)

    Et il y en a d'autres équivalents, tels que Charles Molinari (FC Metz), Jean-Michel Aulas (Olympique Lyonnais) et d'autres, qui ont créé des grands clubs à partir d'à-peu près rien... (P...)

     

     

     

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