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* Mastodonte des Pyrénées
Mastodonte des Pyrénées
Gomphotherium pyreneicum
Découverte majeure aux confins de la Haute-Garonne et du Gers, un crâne presque entier du mastodonte des Pyrénées a été mis au jour dès 2014, une espèce endémique dont jusque-là on n'avait que quelques traces relevées près de 160 ans auparavant, en 1857.
Sculpture réalisée par Phet Wiriya du mastodonte des Pyrénées qui en réalité mesure environ 2,5 mètres au garrot, la taille d'un éléphant d'Asie. Photo Vivien Riout.
Un crâne avec quatre défenses
En 2014, un agriculteur eut la surprise de découvrir dans son champ des ossements d'un crâne avec ses quatre défenses, sur les coteaux du Comminges autour d'un tout petit village près de L’Isle-en-Dodon et de Toulouse, en Haute-Garonne.
Aussi grand qu'un éléphant d'Asie, Gomphotherium pyreneicum diffère des autres Gomphoterium par sa taille, nettement plus petite, par la présence de quatre défenses, deux grandes et deux petites. Si seul le crâne a été retrouvé, c'est sans doute parce que les autres os du corps ont été emportés par les eaux au fil des siècles. Seul le crâne a été fossilisé.
Intrigué, il mit toutefois deux ans avant de se mettre en relation avec un paléontologue amateur, Vivien Riout, qui vit non loin de là, près de Martres-Tolosane. Cet "archéologue amateur" amoureux "du Comminges, enfant de 'Jurassic Park'" se déplace alors pour voir ce qu'on lui présente comme "un crâne de dinosaure". Vivien Riout réalise tout de suite qu'il s'agit d'un Gomphoterium, animal commun dans la région. Sauf que cette espèce est bien différente.
Contactés en septembre 2017, le Muséum d’histoire naturelle de Toulouse et le Muséum d’histoire naturelle de Paris, vinrent dégager le gigantesque fossile et procéder à des fouilles, dans le but de savoir à quelle espèce appartenait ce crâne de mastodonte qui peuplait la région toulousaine à l’époque du Miocène.
Un mastodonte dans les Pyrénées
Très rapidement il fut clair que ce crâne présentait des caractéristiques inhabituelles. Les premières opérations de dégagement confirmèrent en effet les "soupçons" : l'identification tomba, dans ce champ gisait le crâne (le premier jamais trouvé) d'un Gomphotherium pyrenaicum (mastodonte des Pyrénées), une espèce très rare cousine de l'éléphant, qui vivait dans le Comminges il y a plusieurs millions d’années (on parle de 11 ou 13 millions voire plus) et dont on ne sait aujourd’hui presque rien.
En avril 2018, Pascal Tassy, professeur émérite au Muséum d’histoire naturelle de Paris, interrogé par La Gazette du Comminges, expliquait : "Il s’agit effectivement d’un crâne qui est encore relié, et c’est extrêmement rare à sa mandibule, les quatre défenses en ivoire sont présentes. Le crâne et ses défenses mesurent environ 1m60 de long [nu, le poids de ce crâne devrait atteindre 200 kilos], ce mastodonte devait à première vue faire trois mètres au garrot. Pour la datation, nous estimons que ce spécimen date de plus de 13 millions d’années."
Gomphotherium pyreneicum – Moulage du crâne
"C'est la première fois que l'Homme contemple le crâne d'un Mastodonte des Pyrénées, c'est incroyable. Cela faisait 160 ans que les scientifiques remuaient ciel et terre pour trouver d'autres congénères. On se demandait même si il avait bien existé, si les molaires découvertes au XIXe siècle n'étaient pas celles d'un animal difforme." Pierre Dalous, conservateur du Muséum de Toulouse
En effet, ce mastodonte n’était connu seulement que par quatre molaires, découvertes en 1857 du côté de Saint-Frajou. La taille imposante et la simplicité des dents caractérisent cette espèce. Le crâne nécessite encore de nombreux travaux : le dégagement jusqu'au printemps 2019 puis les études scientifiques pour pouvoir situer le mastodonte des Pyrénées dans la lignée des autres Gomphoterium. Le grand public ne le verra sans doute pas avant de nombreuses années...
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Documentation
Gomphotherium
Gomphotherium est un genre éteint de la famille des Gomphotheriidae (ordre des Proboscidea, comme les éléphants actuels). Selon Paleobiology Database, Trilophodon est un synonyme de Gomphotherium.
Les Gomphotheriums possédaient quatre défenses et des molaires raboteuses. Leurs quatre défenses étaient presque droites. Celles du bas se trouvaient le plus souvent tout près l'une de l'autre dans la mâchoire inférieure allongée et étroite, et elles ont pu être utilisées comme une pelle. Celles du haut étaient recouvertes d'une bande d'émail qui couvrait probablement toutes les défenses des proboscidiens anciens, mais a disparu chez les éléphants actuels. Elles font penser à des pics de mineurs et servaient probablement à creuser. Les Gomphotherium avaient également une courte trompe qui retombait sur la mâchoire inférieure (à peu près comme chez le tapir plus récent). – Wikipédia
À lire sur Gomphotherium pyrenaicum
Mastodonte des Pyrénées Gomphotherium pyrenaicum Sculpture Phet Wiriya
Découverte d'un crâne de Gomphotherium (Muséum Toulouse, juillet 2018) (JPG)
Découverte du mastodonte des Pyrénées : "Une espèce rare" (13/07/2018)
Le crâne du "mastodonte des Pyrénées" dévoilé au Muséum de Toulouse (11/07/2018)
Le Mastodonte des Pyrénées récit d'une découverte (PDF) ["en ligne"]
Un crâne du "mastodonte des Pyrénées" au Muséum d’histoire naturelle de Toulouse" [archive] (Le Monde.fr avec AFP, 12 juillet 2018)
Des dessous sousous qui gâchent tout
"Les conditions de fossilisation dans ce coin [du Comminges] sont optimales, livre Vivien Riout. Autrefois, un grand fleuve coulait. Le corps de l'animal a dû finir au fond et permettre une bonne sédimentation." Dans le Comminges, il n'est pas rare en effet de trouver des ossements d'animaux vivant à cette époque. Et ils attisent la curiosité. "Beaucoup de gens sont venus voler ces os ces dernières années, pour ensuite les revendre au plus offrant. C'est ce qui est arrivé au beau-père de l'agriculteur qui a fait la découverte. Il avait découvert une défense et contacté des scientifiques. L'affaire a ébruité et de soi-disant chercheurs toulousains sont venus un jour pour la récupérer. On ne l'a jamais revue. De fait, les gens du coin sont devenus très méfiants."
Il est donc difficile de faire des fouilles sur des terrains privés. Le découvreur a ainsi voulu garder le secret sur son identité et son lieu d'habitation. De peur de voir débarquer une armée "d'archéologues" en herbe faire des trous dans son jardin.