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☼ Robert Hossein 1927-2020
Robert Hossein
1927 - 31 décembre 2020
Le lendemain de son 93e anniversaire, en ce dernier jour de 2020, Robert Hossein, le géant du théâtre populaire et du cinéma familial, est mort.
Il ne manquait que ça à l’année 2020 pour être vraiment "annus horribilis", comme disait jadis Elizabeth II...
Abraham Hosseinoff choisit le pseudonyme de Robet Hossein quand il entra, très jeune, dans la carrière théâtrale. Il commença par adapter des polars à la scène, avec Frédéric Dard.
Une si longue réussite
Résumer une si longue et si éclectique réussite tient de la gageure.
Dans les années 60, Robert Hossein slaloma entre l’intellectualisme de Duras (La Musica) et l’emblématique saga populaire Angélique, Marquise des Anges, où il incarne le personnage de Joffrey de Peyrac, époux balafré et charismatique de Michèle Mercier. Peyrac, boiteux et laid, mais courageux et drôle, qui encouragea des générations de moches à « oublier qu’ils n’avaient aucune chance », selon les mots qui seront plus tard ceux de Michel Blanc dans Les Bronzés.
Le public ne retiendra sans doute, à l’annonce de sa mort, que cette prestation, alors que la palette de l’acteur (qui était aussi réalisateur et metteur en scène) était bien plus vaste. C’est ainsi.
En 1972, Robert Hossein révéla Isabelle Adjani au grand public avec une pièce de García Lorca, ce qui fit entrer la grande actrice à la Comédie-Française dans la foulée. Peu après, il commença une série de mises en scène à grand spectacle, autour de l’Histoire de France mais pas seulement. Danton et Robespierre — présenté au Palais des Congrès en 1979 —, de Gaulle, Jésus — dans le fameux Jésus était son nom —, Jean-Paul II, Les Misérables…
"Jésus était son nom" de Robert Hossein
[https://www.youtube.com/watch?v=8Cw2x3Namro] YouTube 30 décembre 2019
L’imitateur Laurent Gerra moquait souvent, avec une régularité qui tenait de l’hommage, le goût de Robert Hossein pour une certaine grandiloquence scénique.
Le théâtre de Hossein a constamment déplu à ces critiques qui pensent aujourd’hui que Wajdi Mouawad est le sommet de l’art théâtral. Ses grandes machines historiques avec les acteurs disséminés dans la salle, interpellant tel protagoniste imprudemment monté sur scène, défrisaient les poils occultes des éminences littéraires.
Robert Hossein en était peut-être blessé, mais il en avait pris son parti, et il se contentait d’être un metteur en scène immensément populaire, au meilleur sens du terme. Plusieurs pièces montées ou jouées par lui dont Pas d’orchidées pour Miss Blandish, le roman de James Hadley Chase adapté par Frédéric Dard, qui collaborait depuis longtemps avec Hossein : le metteur en scène y jouait l’abominable Slim Grisson, dans une esthétique très empruntée au cinéma, avec des « arrêts sur image » impressionnants.
En 1981, nouveau moment de culture populaire pour Robert Hossein : il fut l’antagoniste cruel et glacial de Belmondo dans Le Professionnel : « le commissaire Rosen, de la brigade sauvage », servi par le regard noir et la voix éraillée de l’acteur, Rosen mort dans un duel au pistolet d’un autre âge contre le commandant Josselin Beaumont (Bébel), soldat sacrifié du service Action.
Robert Hossein aimait être un acteur populaire, comme Belmondo a pu l’être lui aussi. Il aimait avoir été Geoffroy de Peyrac, balafré et sombre, dans la série des Angélique. Ou le voyou nonchalant du Repos du guerrier. Ou ce salopard de commissaire Rosen qui fomente des complots contre Belmondo, justement, dans le Professionnel.
En 1987, Robert Hossein montait Kean, de Sartre et Alexandre Dumas, au théâtre Marigny. Jean-Paul Brighelli, avec deux acolytes, Jean-Luc Rispail et Christian Biet, avaient eu l'idée de proposer à Gallimard une nouvelle collection intelligente pour les jeunes, des textes de fiction ou de théâtre commentés par des personnalités contemporaines. Kean était une merveilleuse ouverture pour une telle collection, Pierre Marchand, qui dirigeait alors Gallimard-Jeunesse s’était enthousiasmé à l’idée. Mais un intello du Monde, Michel Cournot, descendit en flammes l’adaptation de Kean, qui marquait le grand retour de Belmondo sur les planches.
"La collection finalement ne s’est pas montée. L’héritière de Sartre, Arlette Elkaïm, n’a pas souhaité que l’on prostitue un texte de son père adoptif dans une collection pour mômes [...] Du coup, nous avons monté pour Gallimard la collection Découvertes, qui n’a pas mal marché, ma foi." (Jean-Paul Brighelli)
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À Dieu Monsieur Hossein !
Après deux mariages avec de jolies femmes, Robert Hossein vivait depuis plus de quarante ans avec Candice Patou. La disparition de celui qui fut le compagnon de Marina Vlady quand elle était la Princesse de Clèves marque la fin d’une époque, où l’on pouvait aller au cinéma ou au théâtre sans se demander ce qu’en penseraient Libé ou Olivier Véran.
Hossein était très beau tout en ayant une gueule, comme on dit. La voix légèrement embrumée, le regard noir et amical, la direction d’acteurs précise et efficace. En tous points, un grand bonhomme.
Il s’était converti au catholicisme à plus de cinquante ans et avait même été reçu en 2016 par le pape François. À cette occasion, il avait accordé un entretien plein de franchise et de simplicité à Radio Vatican. À 89 ans. Quelle santé, tout de même !
À Dieu donc, Monsieur Hossein !
Sources
Robert Hossein et le théâtre populaire (Robert Hossein 1927-2020) - Causeur 31/12/2020 https://www.causeur.fr/robert-hossein-et-le-theatre-populaire-189492 [https://archive.vn/mQFWP]
Robert Hossein était son nom - Boulevard Voltaire 31/12/2020 https://www.bvoltaire.fr/robert-hossein-etait-son-nom/