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☼ Michel Bouquet 1925-2022
Le comédien est décédé ce mercredi 13 avril 2022 à l'âge de 96 ans.
Un géant du cinéma et du théâtre, unanimement salué par la profession, nous a quittés. L'AFP a révélé que le comédien était mort "dans un hôpital parisien". De nombreuses personnalités et des anonymes ont salué la mémoire de celui qui était considéré comme un immense acteur.
L'état de santé de Michel Bouquet avant son décès reste méconnu. Cependant, Fabrice Luchini a révélé au micro de Pascal Praud * sur RTL qu'il "n'allait pas très bien" depuis quelques mois, sans faire davantage de révélations sur sa maladie. Il a simplement précisé qu'il "commençait à ne plus être maître de tous ses souvenirs" depuis deux ans.
* L'internaute JlT a écrit : Ce matin [14/04/2022] Pascal Praud a passé un extrait cinématographique tout à fait réjouissant avec Michel Bouquet ! C'est à 1h16'30"
On avait récemment aperçu Michel Bouquet au cinéma, puisqu'il jouait dans "Villa Caprice", sorti en 2021. Il jouait encore cette année-là [2021] dans "Juste avant la nuit", un documentaire que Jean-Pierre Larcher lui avait consacré — il était temps. Michel Bouquet y dusait :
« Tous les grands auteurs ont des conversations insensées, toutes les nuits, à discuter entre eux, à travailler comme des dingues, dans un autre monde. Ils parlent entre eux après une représentation théâtrale où ils ont été présents, c’est la vie de l’esprit qui est en jeu, ça mérite le respect, ça mérite qu’on se sacrifie. »
En ce temps-là, les acteurs savaient se tenir. On ne copinait pas. On ne se selfiait pas. On ne jargonnait pas dans les interviews. On ne pleurnichait pas sur l’état du monde. On n’écumait pas, non plus, les plateaux télé pour cachetonner un bien maigre talent. La rareté était le signe des honnêtes hommes. (extrait de Causeur 14/02/2022). "La discrétion, qu'on ne peut dissocier de l'humilité, est une vertu de l'intelligence. C'est à cela qu'on reconnaît les gens de qualité." (internaute V.)
Considéré comme l'un des comédiens les plus talentueux de sa génération, tant pour ses films que pour ses rôles au théâtre.
Né en 1925 à Paris, d’un père officier, celui qui allait devenir un des grands noms du cinéma français prend goût au théâtre grâce sa mère, qui l’y emmène régulièrement. Si Michel Bouquet affichait une nette préférence pour les planches (il avait joué pas moins de 800 fois "Le roi se meurt" d’Eugène Ionesco), son talent d’acteur de cinéma avait été par deux fois reconnu par l’Académie.
Michel Bouquet a tourné avec des réalisateurs de renom, de François Truffaut à Claude Chabrol en passant par Henri Verneuil. On a pu le voir devant la caméra de Truffaut ("La mariée était en noir", "La Sirène du Mississippi"), Chabrol ("La femme infidèle", "La Rupture"), Jacques Deray ("Borsalino"), Verneuil ("Le Serpent"), Michel Audiard ("Bons baisers... à lundi"), Bertrand Blier ("Les Côtelettes"), Alain Corneau ("Tous les matins du monde") ou encore Robert Hossein ("Les Misérables"), Gilles Bourdos ("Renoir")...
Michel Bouquet a reçu deux Césars, en 2002 pour le film "Comment j'ai tué mon père" (film français d'Anne Fontaine) – + Prix Lumière du meilleur acteur. Puis en 2006, couronnant son interprétation de François Mitterrand dans "Le promeneur du Champ-de-Mars" (réalisateur Robert Guédiguian), tout en ombres et finesses byzantines et en peur de disparaître.
Michel Bouquet a joué au théâtre avec les plus grands. Il a été le camarade de Gérard Philipe au Conservatoire, avant de rencontrer Jean Anouilh et André Barsacq au Théâtre de l'Atelier. Lorsqu'il intègre le Théâtre national populaire, c'est auprès de Jean Vilar qu'il fait ses armes.
Sur les planches, son terrain de jeu de prédilection, il a joué "Le malade imaginaire", "L'Avare"... Son interprétation du "Tartuffe" de Molière lui vaut un Globe de Cristal du meilleur comédien. "Le roi se meurt" d'Eugène Ionesco lui valut un Molière.
"Le roi se meurt" était la pièce fétiche de Michel Bouquet. Il se l'est appropriée pour qu'elle soit indissociable de sa personne dans l'esprit du public. Il s'agit en effet de l'une des scènes qu"il a le plus jouées : en 1994, de 2004 à 2006 et de 2010 à 2014. Sa prestation l'a rendu célèbre et lui a permis de décrocher son second Molière du comédien, en 2005.
Michel Bouquet a également été primé du Grand prix national du théâtre en 1994, du Prix Plaisir du théâtre en 1999. "Un des très rares qui ont su mettre en valeur de simples planches, et devant qui le rideau ne baissait pas mais s'inclinait !" (internaute S.)
« Michel Bouquet, 20 ans en 1945, tint le rôle du jeune Scipion, face à Caligula-Gérard Philipe dans la pièce homonyme de Camus. Lui qui demandait anxieusement au tyran :
— Tous les hommes ont une douceur dans la vie. Cela les aide à continuer. C’est vers elle qu’ils se retournent quand ils se sentent trop usés. N’y a-t-il donc rien dans la tienne qui soit semblable, l’approche des larmes, un refuge silencieux ?
— Si, pourtant, répond Caligula.
— Et quoi donc ?
— Le mépris.Croyez-moi ou ne me croyez pas, mais cette réplique impitoyable m’aide encore à vivre aujourd’hui — aujourd’hui que Michel Bouquet est mort. »
Sources
Voir deux vidéos avec La Lettre Patriote
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